L’actu

Catégorie : Présidentielle 2017

Dans le coeur d’Alain Juppé

Alain Juppé fait la course en tête dans les intentions de vote pour la primaire de la droite de novembre ainsi que pour la présidentielle de 2017. Il revient de loin, il fut un premier Ministre décrié et très impopulaire et l’homme est réputé froid et rigide. Le livre de Gaël Tchakaloff propose la découverte d’un autre personnage, attachant, plus « fun » que l’image qu’il offre.

Avec « Lapins et Merveilles » (Flammarion), Gaël Tchakaloff propose un ovni politico-littéraire, le livre est un « récit-enquête » utilisé par l’auteure comme une sorte de psychanalyse personnelle après le décès de sa mère avec laquelle elle avait une relation fusionnelle. Il faut donc accepter d’entrer dans cette galerie de portraits de la galaxie Juppé avec le parti-pris de l’auteure qui est au centre du jeu et qui nous fait partager ses pensées, ses ressentis et ses parallèles avec sa vie personnelle.

Une fois passée la surprise de la forme originale de l’ouvrage, on entre donc dans l’univers d’Alain Juppé. On découvre, au fil des pages, des collaborateurs et soutiens que Gaël Tchakaloff décrit de façon très directe, pas toujours à leur avantage mais on dépasse très largement le domaine des petites phrases traditionnelles dans ce genre de livre.

Les chapitres sont écrits autour des sphères qui évoluent autour d’Alain Juppé, y compris ses amis de la période d’étudiant avec qui il partage au moins un dîner ou un week end par an. Ces personnalités portent un regard sans far et franc sur l’ancien Premier ministre.

Les 18 mois d’immersion de l’auteure dans cette galaxie Juppéiste se retrouvent vraiment dans la découverte de son univers familial recomposé autour de deux épouses, très différentes l’une de l’autre, toutes deux très amoureuses. Ses relations avec son fils et sa fille sont particulièrement éclairantes sur un homme dont certaines fêlures ne se révèlent que dans le cercle intime.

Il ressort de cet ouvrage, très réussit, et qui se lit d’une traite, qu’Alain Juppé est vraiment déterminé à aller au bout de sa démarche présidentielle. Ceux qui en douteraient encore devraient se raviser rapidement. Il n’aurait pas autorisé ce travail dans le cas contraire.

Il parait que ses collaborateurs sont ravis du résultat. Le côté un peu foutraque de l’organisation de son équipe de campagne rassure paradoxalement. En revanche, les portraits de certains membres de son entourage inquiètent un peu. Ce sera d’ailleurs l’un des enjeux de cette élection dans le climat actuel de rejet du politique : souhaite-t-on élire un Président accompagné d’un entourage qui apparait si fermé et, au final, assez peu sympathique ?

La question semble un peu futile au regard des multiples enjeux du rendez-vous présidentiel. Néanmoins, le livre de Gaël Tchakaloff la pose indirectement et probablement involontairement. Les sondages et de multiples initiatives montrent que les Français attendent une autre façon de faire de la politique. Celle qui est décrite dans cet ouvrage apparait très traditionnelle du côté de l’entourage du candidat.

« Lapins et merveilles », Gaël Tchakaloff, Flammarion.

Brèves de primaire(s)

Nos informations sur les coulisses des primaires à droite et à gauche.

Juppé à net ouvert

Un mel adressé à tous les contacts d’Alain Juppé et signé Gilles Boyer, les invite à raconter leur première rencontre avec l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac. Le favori des sondages invite les Français à raconter leur histoire personnelle avec lui, une façon de profiter de sa longue expérience pour la transformer en une relation particulière avec les Français, un moyen également d’humaniser un homme politique qui est toujours apparu raide, un peu trop « droit dans ses bottes ». Les meilleurs témoignages seront publiés sur le blog de campagne du candidat à la primaire de la droite.

Fillon et la société civile

François Fillon est en pleine révolution personnelle. L’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy apparait transfiguré. L’Express daté du 20 avril livre un « exclusif » dans lequel le candidat à la primaire explique qu’il privilégiera des ministres issus de la société civile s’il est élu Président de la République. Il estime, en effet, que les non-politiques ont réussi de belles choses à la tête de ministères, il convient néanmoins qu’ils sont souvent victimes de votes de défiance au Parlement et qu’il sera donc nécessaire de les « protéger ». François Fillon organise le 3 mai, à Issy-Les-Moulineaux, un « rassemblement pour le plein emploi » qui réunira des chefs d’entreprise et des économistes mais pas de personnalités politiques. Un signe ?

Macron avec Jeanne D’Arc

Le 8 mai Orléans fêtera Jeanne D’Arc, comme chaque année. Le maire Les Républicain de la cité, Olivier Carré, a choisi Emmanuel Macron, ministre de l’Économie, comme invité principal de la fête qui animera les rues de la ville tout au long le journée. Un choix pour le moins surprenant qui n’a pas manqué de susciter de multiples réactions courroucées au sein de la gauche locale. Emmanuel Macron succédera à Audrey Pulvar (2014) et Stéphane Bern (2015), ce choix n’est donc pas anodin puisque l’invité d’honneur de ces fêtes très populaires passe de la planète people à la sphère politique… Le Député-Maire d’Orléans a précisé qu’il avait invité Emmanuel Macron dès le mois de février, donc bien avant le lancement de son mouvement En Marche !.

Mélenchon pointe son nez

François Hollande décroche fortement dans les intentions de vote. Tous les regards à gauche se tournent vers Emmanuel Macron ou cherchent une Martine Aubry comme ultime recours. C’est en fait à la gauche de la gauche que cela bouge, Jean-Luc Mélenchon poursuit sa montée en puissance, lentement mais sûrement. Les intentions de vote le donnent autour de 11% voire 16%, il talonne désormais François Hollande, parfois à seulement un point de lui. Les sondages sont-ils l’annonce d’une recomposition à gauche, peut-être plus rapide qu’attendue ? En tout cas, frondeurs du PS et ultras de la gauche ont un « homme providence », il suffirait désormais d’accepter de se retrouver autour de lui. Si la présidentielle semble, à ce stade, hors de portée, les législatives pourraient constituer un objectif  même si le mode de scrutin reste complexe pour les petites formations.

Chasse aux parrainages

Dans une primaire, il ne suffit pas d’être candidat. L’ouverture du site réservé aux parrains des candidats de la droite ouvre le 23 avril, les parlementaires et élus devront alors charger un bulletin et choisir le candidat à qui ils souhaitent donner leur parrainage pour les scrutins des 20 et 27 novembre. Le Parisien révèle que certains rencontreraient de sérieuses difficultés à réunir les précieux laissez-passer, même Jean-François Copé serait en difficulté, comme Nadine Morano et Hervé Mariton. Seuls les quatre principaux seraient assurés d’être dans la course. Quant aux autres… Il est nécessaire pour se présenter à la primaire de la droite de recueillir les parrainages de 25 parlementaires, 250 élus issus de 30 départements différents et 2500 adhérents à jour de cotisation. Jean-Frédéric Poisson, membre du Parti Chrétien-Démocrate de Christine Boutin, inconnu de tous est assuré d’être dans le match, en effet, les formations affiliées à LR sont dispensées de passer par le sas des parrainages…

Les Français et « leur » primaire

Corinne Le Page a annoncé, mardi 19 avril, que l’appel pour l’organisation d’une « primaire des Français » a recueilli en une semaine 45.000 signatures. Interrogée par Jean-Jacques Bourdin sur RMC-BFMTV elle a rappelé le souhait de plusieurs organisations de proposer aux Français une autre primaire « transpartisane » avec des personnalités issues de la société civile et non professionnelles de la politique. L’objectif est de recueillir 500.000 signatures.

Quand le « tous nuls » rejoint le « tous pourris »

C’est la fête aux politiques ! Pas un édito, pas un commentaire, pas une émission où les élus ne soient mis en cause, accusés de tous les maux, éloignés du peuple, incapables de comprendre le quotidien de leurs concitoyens, déconnectés des réalités, la « vraie vie » ne les concerneraient plus… Il étaient « pourris », ils sont en plus « tous nuls », et nous ?

Dans mes différentes activités et responsabilités d’entrepreneur, d’élu, de responsable de syndicat patronal, j’ai eu à affronter ces phrases : « tous pourris », « les politicards »… Certains de mes interlocuteurs n’hésitaient pas à me qualifier de « politicien » au prétexte que je tentais de défendre ceux qui prennent en mains la gestion de notre vie collective, ou simplement parce que, brièvement, j’avais été élu. C’est dire si ces « brèves de comptoir » me sont familières.

Les Français sont ulcérés. Tous ne partagent pas les mêmes motivations mais nombreux sont ceux à en vouloir à leurs dirigeants, à leur reprocher la situation économique désastreuse et le chômage qui ne cesse de gangréner notre société.

Les entrepreneurs sont également en colère. Ils ont raison. Les promesses de réformes ne sont pas tenues, les entreprises sont utilisées comme bouc-émissaires faciles et le ratage monumental de la loi travail ne fait que confirmer cette situation désespérante.

Les initiatives « citoyennes » pullulent. Un ministre en poste lance un mouvement « citoyen et transpolitique », comme s’il n’était pas lui-même déjà au pouvoir, des micromouvements espèrent une primaire citoyenne (voir nos Brèves de primaire(s)), leurs premières déclarations publiques sont d’un populisme qui manque de nouveauté, quelques Français font des nuits blanches « debout » à réfléchir, partager pour changer le monde, mais semblent endormis le jour venu…

Bref, ça râle de partout, nous revendiquons, espérons, sommes devenus les rois du « il faut que », « on devrait », mais dès qu’il faut passer à l’action concrète, il n’y a plus grand monde et les initiatives constructives sont peu nombreuses.

Ceux qui proposent des pistes de réflexion, des réformes parfois radicales, à l’instar de Robin Rivaton, Gaspard Koenig, Jacques Attali ou Hervé Novelli s’exposent aux critiques. Néanmoins, ils sont dans l’action. Ils sont dans le vrai. L’incantation ne sert à rien sinon à se soulager un peu de cette colère qui rode. Les Français ont certes besoin de se faire du bien, de trouver des responsables aux conséquences de leurs inconséquences, alors cibler les politiques, les enfourner tous dans le même sac est facile et pratique, un peu comme aller chez Ikéa.

Nous sommes dans une année pré-électorale. C’est maintenant que les réformes se préparent, au lieu de feindre la révolte, de se réfugier dans la colère, les entrepreneurs, en particulier, devraient se mobiliser, travailler à des propositions et s’organiser pour qu’au lendemain des élections, les promesses se transforment en réformes concrètes.

Les politiques ne sont ni « tous pourris », ni « tous nuls ». Ils sont humains, ils doivent faire face à des électeurs de plus en plus consommateurs, de moins en moins acteurs. Les Français sont prêts pour les réformes à condition que celles-ci ne remettent surtout pas en question leur confort individuel. Cette condition est compréhensible mais destructrice.

Alors nous devons aider les politiques à avoir du courage, les accompagner dans la mise en oeuvre des réformes. C’est une responsabilité concrète qui pèse sur les entrepreneurs pour 2017. À eux de la saisir et de s’engager.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Brèves de primaire(s)

La campagne pour la primaire de la droite est bien lancée, on ne sait toujours pas si elle intègrera le centre, celle de la gauche est officiellement prévue pour les 4 et 11 décembre mais les parties prenantes font tout pour qu’elle n’ait pas lieu. Alors bienvenue à notre nouvelle rubrique « brèves de primaire(s) », pour être au coeur de l’essentiel de l’actualité de la prochaine élection présidentielle.

Fillon, le tournant ?

Candidat à la primaire de la droite, l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy est désespérément donné quatrième des intentions de vote derrière Bruno Le Maire, il lance une opération reconquête. Le week end des 9 et 10 avril a été marqué par un retour en fanfare de François Fillon dans le débat de la droite. Il a multiplié les interviews et les coups contre ses adversaires. Bruno Le Maire est jugé pas si neuf que cela, Juppé un peu tiède dans ses propositions, quant à Sarkozy, les Français n’en veulent plus car ils ne souhaitent pas que se rejoue le match de 2012… François Fillon est un candidat à suivre de près, il est en dehors des modes et des tendances, il a travaillé un véritable projet de rupture et de réformes et il bénéficie de nombreux soutiens.

La primaire des Français

La société civile se bouge dans la perspective de l’élection présidentielle de 2017. Six micromouvements se réunissent afin d’organiser la primaire des Français en octobre. Dans un premier temps leur objectif est de réunir 500.000 signatures sur le site www.laprimairedesfrancais.fr ensuite ils organiseront formellement une primaire dont l’objectif sera de désigner un candidat transpolitique, issu de la société civile et qui ne devra pas avoir baigné trop longtemps dans le milieu politique. L’initiative réuni Génération citoyens du député européen Jean-Marie Cavada, Bleu Blanc Zèbre de l’écrivain Alexandre Jardin, Cap 21 de l’avocate et ex-ministre d’Alain Juppé Corinne Lepage, La Transition de Claude Posternak, Le Pacte civique de Jean-Baptiste Foucault ainsi que Nous Citoyens de Nicolas Doucerain et de l’entrepreneur Denis Payre.

Nuit Debout, source d’inspiration

Le Parisien du 11 avril nous apprend que la Secrétaire d’Etat à l’économie numérique, Axelle Lemaire, s’est rendue en immersion au sein des manifestants de Nuit Debout afin de mieux comprendre leur démarche et de s’en inspirer dans la préparation de la présidentielle. Elle ne serait pas la seule à avoir adopté la même démarche puisque le quotidien rapporte que des membres des cabinets des Ministres Patrick Kaner et Myryam El Khomri ont également tenté de comprendre « in situ » le mouvement Nuit Debout.

Juppé publie son programme

Outre son livre annoncé pour le 11 mai et consacré à ses propositions économiques, Alain Juppé publiera tous les mois des « cahiers thématiques » dans lesquels il développe les grandes lignes de son programme. L’initiative vise sans doute à concrétiser un peu plus le contenu de sa campagne avec une originalité, il propose une co-production avec les citoyens de ses propositions. C’est ainsi qu’il lance une enquête sur la santé, les Français sont invités à répondre à un questionnaire avec quelques questions ouvertes qui permettent de faire des propositions. Parallèlement, il a rendu disponible sur son site internet ses propositions pour l’agriculture le 12 avril.

La Belle Alliance Populaire

C’est le nom choisit par Jean-Christophe Cambadelis pour désigner le mouvement qu’il a lancé le 13 avril autour de personnalités de gauche et des (ex) verts ou associatives et syndicales. Ce collectif inédit comprend également des membres de la société civile, une cible très convoitée en cette année pré-présidentielle. On notera le retour de Fadela Amara, fondatrice de « Ni Putes, Nis Soumises » puis ministre de Nicolas Sarkozy. Un congrès fondateur est prévu pour le mois de décembre mais d’ici là un séminaire aura lieu fin mai avant l’installation de relais en région. Cette Belle Alliance Populaire ne compte aucun représentant de grand parti de gauche, puisque leurs responsables militent pour une primaire à gauche. Sur un plan tactique, elle permet également de contourner, donc de sortir du dispositif, les frondeurs qui n’en sont pas…

Loi travail : le coup de martinet aux entrepreneurs

La Loi travail au départ si prometteuse ne cesse de décevoir et les discussions parlementaires, loin de l’améliorer, risquent de révéler un peu plus en quoi l’entreprise est un marqueur entre droite et gauche dans notre pays. Ceux qui sont les grands perdants dans cette affaire, ce sont les entrepreneurs.

Après Caroline de Haas et sa pétition numérique si fédératrice, celui qui occupe désormais la lumière médiatique est William Martinet. Le patron de l’UNEF, syndicat étudiant proche du PS et pourtant farouchement opposé au projet de loi de Madame El Khomri a réussi le tour de force de mobiliser les lycéens et les étudiants qui ne sont pourtant pas concernés par le dispositif.

De manifestations de rue en #NuitDebout il ne cesse d’infliger au gouvernement de petites humiliations. Les ministres ont beau le recevoir dans leurs jolis bureaux des beaux quartiers parisiens, rien n’y fait, il en veut, ils en veulent toujours plus.

Ce jeune homme est déjà un professionnel du militantisme syndical. Les études ne sont pour lui qu’un « permis de militer ». À 27 ans, ses études ont « trainé » et il est donc encore président de l’UNEF, jadis pouponnière de parlementaires socialistes. Il a fait évoluer son syndicat avec son époque et il le fait coller avec les revendications et les inquiétudes, souvent légitimes, d’une partie de la jeunesse. La Loi El Khomri, maladroitement présentée puisque son texte préparatoire a « fuité » dans la presse, n’est presque qu’un prétexte, une sorte de véhicule protestataire d’une colère sourde de la jeunesse.

Ce projet de loi révèle le manque de préparation du gouvernement, son incapacité à gérer ses soutiens les plus proches ainsi que sa fragilité parlementaire qui se confirme au fil des mois. Il révèle également la faiblesse du lobbying patronal, sa déconnexion avec les outils d’aujourd’hui et son fonctionnement quelque peu désuet.

L’absence de mobilisation du monde de l’entreprise dans la défense de ce projet de loi qui, pourtant, allait dans le bon sens, doit être comprise comme une alerte pour 2017. Il serait vain d’imaginer que les réformes, demandées avec force par les entrepreneurs, pourraient s’engager sans soutien de terrain efficace, sans mobilisation de tous les instants pour braver les conservatismes et soutenir les dirigeants politiques mandatés pour les mener à bien.

Le monde de l’entreprise doit rapidement cesser de se lover dans les incantations et les revendications de salon pour s’organiser avec sérieux s’il veut que 2017 ne soit pas qu’un rendez-vous manqué de plus.

Mathieu Quétel, président de Sountsou