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Catégorie : Lobbying

La politique du Tweet 

Le remaniement en préparation dans les coulisses de l’Élysée et annoncé pour la semaine du 15 février réservera sans doute quelques surprises, la première d’entre elles est l’apparition de Twitter dans la communication de certains pressentis.

La rumeur a enflé au fil des jours : François Hollande aurait demandé à Nicolas Hulot d’entrer au gouvernement et de prendre la tête d’un « super-ministère » de l’ Écologie avec, à la clé, quelques annonces, attendues de certains écologistes, comme l’abandon de l’aéroport Notre Dame des Landes.

Nicolas Hulot n’a pas souhaité s’engager dans une mission ministérielle à 16 mois de l’élection présidentielle, c’est à dire à un moment où son action ne pourra forcément apparaître que limitée. S’il ne vise pas nécessairement une présence dans le combat de 2017, il doit être sensible au positionnement d’Alain Juppé qui envisage un gouvernement très large dans sa composition.

La surprise est venue d’un Tweet, rédigé par son équipe le 4 février par lequel il officialise son refus d’entrer au gouvernement : «Nicolas Hulot n’entrera pas au gouvernement. Il remercie le Président de la confiance qu’il n’a cessé de lui accorder.»

Autre Tweet qui aura fait le tour des médias et suscité une réponse agacée du Premier ministre, celui que Christiane Taubira a publié le 27 janvier en prenant soin de le signer : « Parfois résister c’est rester, parfois résister c’est partir. Par fidélité à soi, à nous. Pour le dernier mot à l’éthique et au droit. ChT ». Un Tweet qui bénéficiera de 18.800 partages et 15.600 « j’aime ».

Quant à Gilles Boyer, le principal collaborateur d’Alain Juppé, il se contentera d’un Tweet sobre, lors de l’émission « Des Paroles et Des Actes » du jeudi 4 février en présence de Nicolas Sarkozy : « Tu ne tweeteras point. ». Façon de dire qu’il y aurait tant de choses à tweeter…

Tweeter est donc devenu un outil de communication prisé des politiques et qui peut se révéler très efficace pour faire passer des messages. Un élément que les entreprises qui se lancent dans une démarche d’influence ne peuvent ignorer.

Présidentielle : entrepreneurs, agissez dès maintenant

Les élections présidentielles et législatives semblent encore loin ; certains hésitent à travailler les argumentaires dès à présent. Grave erreur. Les équipes de campagne sont en place. Les premières contributions commencent déjà à être publiées. Vous souhaitez convaincre les candidats aux élections. Il est donc temps de vous y mettre, et de faire connaître vos propositions aux candidats et aux équipes de campagne.

Une élection se prépare très en amont, elle suit un parcours minutieux constitué de la mise en place de l’équipe de campagne, du recueil des fonds, de la participation à d’éventuelles primaires, de la réflexion aux idées par thématiques, mais également du choix de messages forts à mettre en avant. Cette phase de préparation est aussi l’occasion, pour les candidats, d’écouter les différents acteurs de la société civile (dont font partie les entreprises) et de repérer des axes de travail qui pourraient intégrer leur programme, voire devenir des éléments de communication majeurs.

Une campagne électorale se construit sur un positionnement en termes de communication. S’agissant de l’élection présidentielle, les candidats vont essayer de repérer des défaillances du président sortant dans les domaines cruciaux de la société et de l’économie pour en faire des messages porteurs pour eux-mêmes autour desquels ils déploieront des contre-postures et des éléments de campagne.

Un exemple concret : la fiscalité. Il est évident que les premiers mois du quinquennat ont été marqués par des augmentations d’impôts significatives. Même si le Gouvernement fait le pari que les baisses initiées à partir de 2015 devraient corriger le sentiment général, il est probable que ce ne soit que partiellement le cas. Les impôts seront donc un axe de communication. Par exemple, le débat sur l’impôt de solidarité sur la fortune, sujet « segmentant » et clivant, va probablement revenir sur le devant de la scène. Il constituera un élément d’identification entre les candidats de réforme à tendance libérale et ceux qui estiment qu’il ne faut pas toucher à ce dispositif, soit parce qu’il est précisément trop identifiant à droite soit parce qu’il est un marqueur de la gauche.

Il en sera probablement de même des 35 heures : elles feront partie du débat programmatique, tout comme la réforme du droit du travail…

Ces réformes, qui apparaissent de plus en plus indispensables pour « fluidifier » l’économie et redonner confiance aux entreprises, ne pourront être portées que par des candidats qui auront le courage de les défendre et se sentiront soutenus.

Il faut donc les contacter avec des demandes précises mais également des argumentaires illustrés d’exemples et de chiffres afin que des propositions puissent être portées de façon efficace.

Cette alimentation des candidats doit s’effectuer pendant la phase de préparation de la campagne, au moment de l’élaboration des programmes. Les frontières entre droite et gauche sont aujourd’hui plus perméables vis-à-vis du monde de l’entreprise, alors il convient de ne pas hésiter à porter des propositions innovantes et originales.

Mathieu Quétel, président de Sountsou et auteur des Cahiers Experts.

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Présidentielle : quelle place pour les entreprises ? 

Le triptyque chômage, immigration et sécurité sera probablement au centre des préoccupations des Français pour la présidentielle de 2017. À lire les premières ébauches de programmes, la dimension économique semble être un élément essentiel pour tenter de repartir à la conquête de la croissance. Reste une question : comment les différents candidats vont-ils appréhender l’entreprise dans leurs programmes.

Les chefs d’entreprise semblent à bout. Comme l’ensemble des Français ils sont lassés des promesses non tenues, des demies réformes et des lourdeurs qui ne cessent de peser sur leur environnement direct. Avec la présentation du rapport de la commission Badinter, lundi 25 janvier, c’est la base du futur projet de loi travail de Myriam El Khomri qui est posé. Le moins que l’on puisse dire c’est que le flou est quasi total sur le texte qui sera finalement présenté en Conseil des ministres, le 9 mars.

Le rapport Badinter est typique de ces grandes réformes lancées avec fracas et qui se révèlent trop souvent déceptives pour le monde de l’entreprise. Avec le code du travail, on touche à l’un des derniers tabous de la gauche et il est peu probable que le projet de loi El Khomri soit finalement à la hauteur des attentes.

C’est tout le paradoxe de cette année 2016, la préparation de la campagne présidentielle ouvre la porte à tous les espoirs pour le monde économique, qui espère des réformes importantes pour remettre de la fluidité dans le quotidien des entreprises, redonner espoir aux créateurs de richesses et d’emplois et retrouver le chemin de la croissance mais le risque de déception est très grand.

Les entreprises et leurs Fédérations professionnelles se sont mises au travail pour établir des propositions en direction des équipes de campagne afin que les candidats intègrent dans leurs programmes respectifs des éléments de nature à redonner de la confiance au monde économique.  L’enjeu est de taille, il s’agit de renouer avec la croissance et surtout de permettre à la France de se mettre en phase avec un monde qui semble évoluer sans elle sur bien des sujets.

Si on s’en remet aux déclarations d’intentions des principaux candidats à la primaire de la droite et du centre, on peut s’attendre à un train de réformes en profondeur, en cas d’alternance en 2017. Les sénateurs LR viennent de publier 25 propositions concrètes qu’ils ambitionnent de traduire dans une proposition de loi attendue pour le printemps. Quant à la gauche, elle promet d’achever sa mue et d’adopter une attitude plus proche des entrepreneurs. À entendre les crie d’orfraie suscités par le timide rapport Badinter, on est en droit d’être inquiet.

La société civile n’est pas en reste et compte bien participer activement au débat de la présidentielle et à proposer une alternative, mais sera-t-elle en situation d’aller au bout de la démarche ? Les animateurs des mouvements La Transition et Nous Citoyens assurent que oui.

En tout état de cause, les entrepreneurs et leurs Fédérations professionnelles ont tout intérêt à se mobiliser, à travailler à des propositions concrètes et à se tenir prêts à veiller scrupuleusement à leur application à l’issue de l’élection.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Auteur de la Collection Les Cahiers Experts, le nouveau numéro « Présidentielle 2017 : 10 conseils pratiques pour faire entendre la voix des entrepreneurs » est disponible en téléchargement ici.

Lobbying : les différences entre taxis et VTC

La semaine a encore été marquée par les tensions entre les chauffeurs de taxis et les VTC. Les premiers reprochent aux seconds de cannibaliser leur activité sans être soumis aux mêmes règles contraignantes, ils accusent surtout le gouvernement d’être laxiste dans l’application de la loi et de ne pas respecter ses engagements. Les taxis choisissent le lobbying de rue, quand les VTC font appel au lobbying de conviction. 

Les aéroports et routes ont été bloquées cette semaine par des taxis en colère qui n’ont pas hésité, comme en juin 2015, à avoir recours à la violence pour se faire entendre. Les taxis expriment ainsi leur désarroi face à la baisse d’activité dont ils se disent victimes depuis l’arrivée des VTC et de la prolifération des offres qui s’effectuerait dans « une anarchie totale ».

Pourtant la loi Thévenoud de 2014 dispose que le transport onéreux de passagers, en voiture est l’apanage des taxis, qui bénéficient du monopole de la maraude sur la voie publique, et des VTC, dûment licenciés et avec obligation d’une réservation préalable. Le covoiturage est possible sous réserve d’un trajet effectué par le chauffeur pour lui-même et dont les coûts sont simplement partagés.

Or, les taxis estiment que ces règles ne seraient pas respectées par 40% des chauffeurs travaillant par Uber, ce que conteste évidemment la société californienne qui revendique que les utilisateurs de sa plateforme sont tous des professionnels. Le grand enjeu est également celui des aéroports aux abords desquels les VTC sont accusés par les taxis de faire du « racolage agressif » en infraction avec la loi. Quant au gouvernement, il lui est reproché de ne pas faire respecter la loi, il serait dépassé par l’ampleur du phénomène VTC.

C’est dans ce contexte que les taxis envahissent les routes et font brûler des pneus. Leurs représentants, expliquent qu’ils revendiquent une indemnisation publique pour la perte de chiffre d’affaires qu’ils auraient subit et de valeur de leur licence.

De son côté, Uber fait le choix de l’explication. En association avec d’autres sociétés de VTC, AlloCab, Chauffeur-Privé, Cinqs, Marcel et SnapCar, elles s’adressent à leurs clients par mels pour les inciter à signer en ligne une pétition  pour dire « non à la fin des applis » qui sera envoyée sous forme de lettre (« imprimée sur papier recyclé ») directement au Président de la République et au Premier ministre.

Parallèlement, Uber investit dans des annonces presse avec la signature « 70.000 entrepreneurs ». Il met l’accent sur le fait que « plus de 25% des chauffeurs qui se connectent aujourd’hui sur Uber étaient au chômage avant de rejoindre la plateforme » et affirme « qu’ils pourraient être demain 70.000 » en citant le rapport Thévenoud publié en avril 2014. Ce faisant, Uber replace la plateforme sur le double-terrain du service aux clients et de l’entrepreneuriat. Il joue sur la corde sensible à un moment où le chômage bat des records en France et que la croissance semble introuvable.

D’un côté les taxis persistent dans leur stratégie du lobbying de rue qui peut paraitre agressif aux yeux des Français et risque fort de ne pas améliorer leur image dans l’opinion, tant elle est éloignée de celle des agriculteurs par exemple, de l’autre, les VTC font le choix de l’explication et de la démonstration des effets de leur activité sur le chômage et dans la défense de l’entrepreneuriat individuel tout en participant à une nette amélioration des services apportés aux clients.

La stratégie des taxis apparait risquée. D’autant qu’ils sont nombreux à faire de réels efforts pour améliorer l’image de leur profession auprès du public. Au lieu de capitaliser sur cette nouvelle génération, la profession semble avoir décidé de jouer la partition de la rue et de l’exaspération. Un choix par forcément gagnant.

Les cadeaux, degré zéro du lobbying ? 

Le début d’année est toujours l’occasion des voeux. Si de plus en plus d’entreprises et de fédérations professionnelles renoncent aux cartes, jugées un brin surannées, d’autres les conservent et vont plus loin en perpétuant la tradition des cadeaux. Des initiatives qui peuvent se révéler malheureuses lorsqu’elles s’adressent aux élus.

Les élus changent, une nouvelle génération est apparue ces dernières années, très attachée à son indépendance et à une forme d’éthique jusque là assez inconnue dans les salons feutrés de la République. C’est ainsi, que chaque année au moment des voeux, fleurissent sur les réseaux sociaux des tweets et statuts courroucés ou ironiques sur les cadeaux reçus de la part de tel ou tel groupe d’intérêts.

Cette semaine j’en ai relevé un particulièrement savoureux accompagné d’une photo et qui posait la question « Dites @xxxxxxx, on ne vous a jamais dit que les cadeaux aux députés, c’était le degré 0 du lobbying ? ». Une interpellation publique qui a connu un certain succès au vu du nombre de retweets opérés par les 6000 followers de cette parlementaire.

L’affaire aurait pu en rester là si le syndicat professionnel ainsi mis en cause n’avait pas jugé utile de répondre via twitter avec, en plus, un manque évident d’humour. La députée s’est donc livrée à une leçon de lobbying en règle et a conclu l’échange par un dernier tweet cinglant « retour à l’envoyeur, désolée ». Ce n’est pas tant le lobbying en lui-même qui est ici en question que certaines pratiques qui relèvent d’un passé révolu ou en voie de l’être.

Dans le premier numéro de notre collection Les Cahiers Experts intitulé « Les 10 erreurs à éviter en relations institutionnelles », nous consacrions un chapitre à la question des cadeaux. C’est un sujet délicat car ces derniers doivent être utilisés avec parcimonie et finesse. Il convient de veiller à ne pas adresser un mauvais message. La France de 2016 n’est plus celle des années 80 et nos élus ont changé de posture. Ils acceptent bien volontiers de dialoguer avec les représentants d’intérêts, et certains reconnaissent même leur utilité dans l’accès à l’information et dans l’aide à la prise de décision mais nombreux sont ceux à être sourcilleux, à juste titre, de leur indépendance et de leur intégrité.

Je considère depuis longtemps que les cadeaux sont non seulement le « degré zéro du lobbying » mais également qu’ils appartiennent aux méthodes du « lobbying à la papa ». Je mets dans le même panier les déjeuners dans les restaurants coûteux et autres fantaisies qui ne relèvent pas d’un travail de conviction.

Cet incident assez drôle rappelle également que les élus ne se laissent plus faire et, au passage, que les réseaux sociaux peuvent se révéler redoutables.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Auteur de la Collection Les Cahiers Experts, le nouveau numéro « Présidentielle 2017 : 10 conseils pratiques pour faire entendre la voix des entrepreneurs » est disponible en téléchargement ici.