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Catégorie : Édito

Lobbying : rentrée décisive pour les entreprises

Cette rentrée marque le point de départ de la campagne présidentielle de 2017. Les états majors se mettent en place pour les éventuelles primaires et dans tous les partis, les candidats se préparent. Les entreprises doivent se saisir de cette opportunité pour mettre en place une démarche d’influence.

Les 18 mois qui nous séparent de l’élection présidentielle doivent être investis par les entreprises pour poser leur stratégie d’influence et peser dans les propositions qui seront portées par les différents partis lors de la campagne électorale.

Un lobbying stratégique pour les sept prochaines années

Le travail mis en place dans cette « fenêtre » démocratique leur sera utile pendant les sept prochaines années. Il s’agit donc d’un investissement en temps, en argumentaires et en rencontres à ne pas manquer. Une démarche prospective pour faire le point sur les évolutions législatives ou règlementaires indispensables pour s’adapter aux mutations technologiques en cours, par exemple.

Après les élections régionales de décembre, tous les élus territoriaux auront été renouvelés, les grandes régions seront en place et la réforme territoriale sera déployée en quasi totalité. La présidentielle et les législatives de 2017 forment la dernière étape du cycle démocratique en cours.

Les entrepreneurs ne cessent de se plaindre du manque de prise en compte de leurs demandes par les différents gouvernements et de l’absence de réforme structurelle qui pèsent sur la reprise et la création d’emplois. Ils revendiquent, à juste titre, leur besoin de renouer avec la confiance pour consentir des investissements et embaucher.

Dans ce contexte, les entreprises doivent s’emparer plus volontairement et efficacement des sujets politiques et saisir les rendez-vous démocratiques pour faire entendre leur voix. Nous sommes dans cette fenêtre idéale.

Les primaires, un enjeu de lobbying

Les primaires sont devenues de véritables enjeux, incontournables, au sein des deux grands partis de gouvernement. Pour la première fois, la droite va soumettre ses candidats putatifs à cette campagne interne, qui fera émerger des différences d’approches et de sensibilités. Les entreprises doivent s’emparer de ces primaires internes pour défendre des propositions concrètes auprès des différents staffs de campagne et des candidats.

Ce travail, entrepris dès à présent, portera ses fruits. En effet, notre pays connait un fort renouvellement de ses élites politiques et en cas d’alternance en 2017, de nouveaux responsables apparaitront. Dans le cas d’une stabilité démocratique, le pacte interne à la gauche mettra également en avant de nouveaux poids lourds qui auront joués un rôle dans la victoire et seront aux manettes.

Les responsables thématiques, hauts fonctionnaires, élus locaux, issus de la société civile, deviendront députés, membres de cabinets ou cadres du parti majoritaire, ils seront des relais d’influence incontournables pendant les prochaines années. Le travail entrepris dès à présent sera donc rentable sur le long terme, il permettra d’identifier et de rencontrer les hauts responsables de demain.

Le lobbying doit s’inscrire dans la durée

Le lobbying est un travail de long terme, il se prépare en amont et vise à faire connaître les attentes et demandes des porteurs d’intérêts. La construction des programmes politiques qui seront mis en oeuvre après les élections de 2017 constitue un rendez-vous incontournable pour les entreprises ou les secteurs d’activité qui souhaitent se faire entendre et investir sur l’avenir.

Les 18 mois qui nous séparent de l’élection présidentielle sont cruciaux. Les démarches des entreprises doivent être engagées dès à présent, quand les axes politiques des campagnes sont en cours de définition. Après les primaires, à la fin de l’année 2016, ils feront l’objet d’ultimes arbitrages entre les candidats afin de construire une majorité autour d’un programme. La période actuelle est donc idéale pour initier une démarche, réfléchir à des objectifs et bâtir des argumentaires à transmettre aux équipes de campagne.

La campagne n’est pas jouée d’avance

Pour être efficace, une démarche institutionnelle dans cette période de pré-campagne doit évacuer les idées reçues et les « à priori ». Le premier d’entre eux est bien entendu l’idée selon laquelle les jeux seraient déjà faits, que tel ou tel candidat serait hors course à la lecture des sondages. Or, l’élection se gagne, ou se perd, jusqu’à la dernière minute de la campagne. Il convient de ne pas oublier que tout est possible dans une campagne électorale. Les dirigeants d’entreprises et de Fédérations professionnelles doivent considérer chaque candidat comme un présidentiable sérieux et travailler avec l’ensemble des équipes de campagne. Dans la phase finale de l’élection, lorsque les ultimes alliances se noueront, chaque candidat sera susceptible de négocier des éléments de campagne ou de réforme à mettre en oeuvre au sein de la nouvelle majorité de gouvernement.

Les porteurs d’intérêts qui souhaitent se faire entendre dans cette campagne, devront faire preuve de créativité tant sur le fond que sur la forme de leurs propositions. Il faudra se différencier des multiples sollicitations dont seront l’objet les candidats. Ces derniers sont également en attente de propositions qui permettront de « cliver » et de les installer dans une niche de communication, notamment les challengers.

Il est possible de faire entendre la voix de l’entreprise et défendre des mesures qui créeront, demain, un environnement plus favorable à l’économie. Pour y parvenir, les entrepreneurs doivent se prendre en mains et s’emparer des codes de la politique, cela commence avec l’élection présidentielle, ce rendez-vous démocratique majeur de la Vème République.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Cette tribune a été publiée dans Les Échos, le 19 août.

Parlement : la vigilance s’impose

L’Assemblée Nationale et le Sénat sont en session extraordinaire d’été avec un ordre du jour particulièrement chargé. En effet, les textes se bousculent et ne concernent pas, hélas, les grandes réformes dont le pays aurait besoin mais des adaptations permanentes d’un corpus législatif et réglementaire déjà omnipotent.

L’incident est passé inaperçu mais il en dit long sur le travail législatif du moment. Le député Patrick Bloche a déposé une proposition de loi dont le but est de permettre aux Français de ne pas subir les effets pervers du changement de norme de la TNT qui entrera en vigueur en 2016. Lors de l’examen de ce texte, les députés ont supprimé des articles, votés en 2007, et visant à obliger les éditeurs de TNT à couvrir 95% de la population et 91% du territoire de chaque département. Un dispositif un peu abscons mais qui est très important puisqu’il garantit une réception en TNT en quasiment tout point du territoire national… Les sénateurs, qui se sont aperçus de la bourde, s’attachent donc à rétablir ces articles par voie d’amendement.

La loi est devenue tellement complexe, les textes sont si nombreux que les parlementaires eux-mêmes finissent par s’y perdre. Ils ne disposent plus du temps nécessaire à la réflexion et au débat de fond sur la plupart des projets de loi, à part ceux qui deviennent des enjeux politiques forts. Ce fut le cas de la loi Macron qui a terminé son parcours législatif, à bout de souffle, transformée en texte fourre-tout, sorte de Samaritaine de l’économie et des besoins gouvernementaux. C’est ainsi que 202 articles lui ont été ajouté au cours des mois de débats parlementaires et que la veille du troisième 49-3 nécessaire à son adoption, le gouvernement l’a complétée d’un nouvel article, en urgence, afin de permettre l’enfouissement de déchets radioactifs en Moselle…

Cette « hystérisation parlementaire » engendre une ambiance un peu lunaire. Les entreprises, surtout les PME, rencontrent de réelles difficultés à s’y retrouver et doivent appliquer des dispositions qui alourdissent leur quotidien quand leur énergie devrait être tournée vers la création de valeur. L’empilement des textes, des obligations, dans différents domaines est le fruit de savants mélanges politiques et de dosages afin de créer les conditions d’une unité de la majorité gouvernementale, nécessaire pour les derniers mois du quinquennat. Sauf que les enjeux purement politiques n’ont que peu de rapport avec ceux des entrepreneurs qui, au contraire, ont besoin de fluidité, de stabilité et, surtout, de plus de souplesse.

Dans la perspective de la présidentielle de 2017, c’est un sujet que les équipes de campagne devront intégrer et que les candidats devront s’engager à respecter. Encore faut-il que les entreprises s’investissent dans cette campagne et fassent connaitre leurs demandes. Peut-on accepter que les programmes soient imaginer par les seuls membres des équipes des candidats, eux-mêmes issus bien trop souvent de la haute fonction publique ?

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Taxis : la victoire du lobbying de la violence

Le Premier ministre s’est félicité de la reculade de la société Uber qui a finalement décidé de suspendre son service UberPOP, « à la suite des actes de violence » observés lors des manifestations de taxis des 25 et 26 juin. Cet épisode n’est pourtant glorieux ni pour Uber, ni pour les taxis, ni pour le gouvernement. 

Uber, fidèle à sa stratégie de rupture et de transgression, a tenté de passer en force avec arrogance et une forme de désinvolture qui finissent, comme dans d’autres pays, par se retourner contre elle, malgré la popularité de ses services. On peut s’interroger sur cette stratégie de la terre brûlée et sur les impacts qu’elle pourrait avoir sur le modèle économique de Uber, dont l’avenir est déjà suspendu à l’issue d’une condamnation en Californie qui considère que ses chauffeurs sont en fait des salariés. La société s’est certes félicitée de sa notoriété qui a fait un bond en avant, et des records de téléchargements de son application après les échauffourées, mais elle oublie un peu vite que l’ensemble de l’image de la profession des VTC est entachée, la sienne, probablement également.

Les autres sociétés de VTC sont toutes victimes de cette communication cassante, puisqu’elles sont confondues avec Uber et ont subi les mêmes violences que la firme américaine, souvent dans l’indifférence générale. Pourtant, nombre d’entre elles, sont Françaises, paient leurs impôts sur le sol national, respectent parfaitement la réglementation et ne souhaitent qu’une chose : développer leur activité dans un secteur devenu très concurrentiel. Quant aux chauffeurs, souvent auto-entrepreneurs, il ne faut pas oublier qu’ils se sont pris en mains et ont créé leur propre emploi et doivent également assumer des charges comme tout entrepreneur, ils ne sont certainement pas des « travailleurs clandestins ».

Les taxis ont quant à eux été fidèles à eux-mêmes en adoptant un lobbying de rue, agressif et violent qui donne une image déplorable de la France et qui, plus que leur désarroi, montre leur désintérêt pour leur clientèle. Ils ont remporté une nouvelle victoire par l’utilisation de ces méthodes hautement contestables où la violence physique est un incontournable ingrédient de la revendication.

Quant au gouvernement, il ne devrait pas trop se vanter sur le fait que  sa « détermination, dans ce domaine-là, comme dans bien d’autres, a payé », car c’est tout le contraire qui s’est passé. Le gouvernement a cédé en rase campagne à des manifestants déchaînés et sans limite qui ont fait acte de violence pour obtenir satisfaction. Pire, dans un contexte de chômage record, il pointe du doigt des citoyens qui créent leur propre emploi, travaillent dur. S’agissant de UberPop, il stigmatise des Français qui ne cherchent qu’à mettre un peu de « beurre dans les épinards » pour boucler des fins de mois difficiles, certes dans un espace réglementaire boiteux.

Le message adressé aux professions et aux Français qui souffrent, à ceux qui n’en peuvent plus des charges et des contraintes diverses qui pèsent sur eux au quotidien est assez clair : rendez-vous dans la rue, soyez violents et nous vous écouterons… Une belle victoire du populisme et un incontestable coup porté au dialogue et à la recherche du consensus.

Or, les impacts du numérique sur notre économie traditionnelle n’en sont qu’à leurs balbutiements et ils pourraient susciter encore de très fortes tensions dans de nombreux secteurs qui seraient également légitimes à se « révolter » au lieu de s’adapter. Le gouvernement devrait plutôt s’intéresser aux conditions d’une nouvelle régulation de l’économie, revoir son approche, en évitant la stigmatisation de la nouvelle économie et en privilégiant les ponts vers la transition numérique. Le numérique n’est pas une alternative, il ne s’agit pas d’une option, il est présent et irrigue tous les pores de la société et de l’économie, il bouleverse les usages de nos concitoyens. Il sera difficile voire impossible de s’y opposer.

Uber, les VTC et les taxis devraient revoir leurs stratégies d’influence, le résultat obtenu n’est bon pour personne. Il brouille l’image des VTC, assimilés à des « travailleurs clandestins », il caricature les artisans taxis, transformés en brutes violentes à cause de quelques-uns d’entre eux. Mais dans ce match, les VTC conservent une longueur d’avance : les clients sont avec eux.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Les entreprises doivent se mobiliser pour 2017

L’élection présidentielle approche à grands pas et elle constitue, pour les entreprises, une belle opportunité de se faire entendre des politiques et de proposer des mesures qui pourraient être adoptées après les élections législatives de 2017.

C’est en ce moment que les programmes, notamment économiques, des candidats se s’établissent et que toutes les mesures à proposer à nos concitoyens pendant la campagne sont évaluées au sein des staffs de campagne, notamment ceux de l’opposition qui préparent les primaires de novembre 2016.

Les entreprises et les Fédérations professionnelles bénéficient d’écoute de la part des candidats et de leurs équipes et peuvent proposer des mesures correctrices qui constitueront, pour certaines d’entre elles, des éléments du programme présidentiel. Un enjeu de taille qu’il convient de ne pas sous-estimer, en effet, une telle occasion ne se présente que tous les cinq ans et les premiers mois d’un quinquennat sont le moment rêvé d’engager des réformes. Du moins, lorsqu’il y a volonté de réformer.

S’il est vrai que tous les candidats à l’élection présidentielle ne seront pas porteurs des mêmes ambitions réformatrices, ou de la même attention envers le monde économique, ce rendez-vous préparatoire des programmes est un point de rencontre incontournable qu’il convient de ne pas délaisser.

Nous reprochons en permanence, souvent à raison, le manque de volonté, voire de courage des élus en matière de réforme économique. Cette opportunité pour participer à la construction des réformes dont le pays à besoin pour renouer avec la croissance et la création d’emplois est à saisir absolument.

Il est  temps de réfléchir et d’organiser la transmission de propositions concrètes aux équipes de campagne de tous bords afin de faire en sorte que l’entreprise et, plus largement, le monde économique soient enfin concrètement associés aux décisions de demain et à l’indispensable réforme en profondeur dont notre pays à tant besoin.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Rétablissons le dialogue entre politiques et entrepreneurs

Les récentes péripéties de la loi Macron ont montré, une fois de plus, à quel point le monde de l’entreprise reste à la fois incompris et clivant pour certains élus.

La loi Macron a créé une véritable crise au sein de la majorité au prétexte qu’elle envisage l’entreprise avec une vision plus positive et permet un desserrement de contraintes qui apparaissent aussi dépassées que dangereuses. Les frondeurs et le Front de gauche ont trouvé dans les 200 articles de ce projet de loi, malgré les 400 heures de débats, matière à polémique et surtout à blocage.

Globalement, l’entreprise reste incomprise de certains élus. Pire, elle est utilisée comme marqueur de la « vraie » gauche même si ce calcul politicien doit aboutir à de la casse économique. Qu’une forme de paupérisation ronge les artisans et les petits-commerçants n’est absolument pas intéressant aux yeux de ces élus qui sont porteurs d’une idéologie « pure » et qui se posent en garants du respect d’engagements électoraux déjà périmés au moment où ils étaient exprimés…

La droite n’a pas été très brillante lors des débats. Le député (LR) Frédéric Lefebvre a raison lorsqu’il dénonce « les postures » de droite et de gauche. La crainte de voter une loi portée par le gouvernement a été plus forte que la logique de soutenir des réformes, même limitées, qui vont dans le bon sens. Une situation ubuesque qui confirme la stratégie actuelle des Républicains (mais également de l’UDI) de s’adresser en priorité aux militants du parti plutôt qu’aux Français. Une stratégie dictée par un logiciel politique des années 80 (1980 pas 2080…) et qui aurait besoin d’une profonde mise à jour.

Le gouvernement s’est également montré défaillant en transformant la loi Macron en loi « fourre-tout » qui mélange les réformes et concerne trop de secteurs à la fois. La loi a perdu en visibilité et en clarté, les entreprises vont devoir désormais détecter les différentes modalités qui les concernent, un casse-tête de plus.

Nous pointions la semaine dernière les prises de positions provocatrices et un brin irresponsables de Ségolène Royal contre des entreprises, cette posture est finalement partagée par trop de  responsables politiques de premier plan, alors que les parlementaires et les élus locaux souhaitent défendre les acteurs économiques mais n’ont que peu accès aux médias. Toutefois, si l’entreprise et les entrepreneurs restent incompris des dirigeants politiques, ils en sont souvent responsables, car nombreux sont ceux qui refusent d’adopter une démarche volontariste en direction des élus. C’est un tort.

Les opérations médiatiques telles que les universités d’été du MEDEF ou « Planète PME » ne sont que des sparadraps qui ne cautérisent pas les blessures et les incompréhensions. C’est l’ensemble des relations entre les entrepreneurs et les dirigeants politiques qui doivent être remises en question, on doit sortir de « l’entre-soi », pour mettre en avant les entrepreneurs de terrain et la réalité de notre économie.

Mathieu Quétel, président de Sountsou