L’actu

Mois : octobre 2015

Des boulangers empêchés de travailler

Nous évoquions ici en février dernier la situation ubuesque de Stéphane Cazenave, boulanger des Landes, poursuivi avec trois de ses confrères pour avoir vendu du pain tous les jours de la semaine. Le tribunal a rendu son verdict, aux effets douloureux et sévères.

Ce n’est pas la condamnation à 500 euros d’amende avec sursis qui est gênante pour les entrepreneurs empêchés de travailler, mais le fait que celle-ci soit inscrite dans leur casier judiciaire. Ils vivent cette inscription comme une ultime humiliation qui pourrait leur poser problème dans la gestion de leurs entreprises, par exemple dans leurs relations avec leurs banques.

En février Nicolas Sarkozy et certains élus des Républicains s’étaient mobilisés et avaient pris fait et cause pour les entrepreneurs à qui il était reproché d’ouvrir tous les jours de la semaine, dimanche compris, alors qu’un arrêté préfectoral l’interdisait. Stéphane Cazenave s’était immédiatement « mis en règle » en fermant le lundi, mais il a tout de même été condamné.

Selon le boulanger, si une fédération s’oppose à l’ouverture tous les jours, d’autres ont pris position pour une ouverture en continu, sous condition, bien entendu, que les règles sociales soient respectées. L’arrêté en question, qui date de 1999, interdit aux boulangers de fabriquer et de vendre du pain mais pas des sandwichs. Il semble également inadapté au rythme touristique des villes concernées puisqu’il autorise l’ouverture sept jours sur sept de juin à septembre, alors qu’à Dax, ville thermale, la saison s’étend de mars à novembre avec un pic en septembre…

Outre le caractère ubuesque de cette situation, elle pourrait coûter des emplois, puisque les boulangeries concernées envisagent de licencier chacune de un à deux salariés. Ce cas, presque d’école, montre les limites de la législation sur le travail ainsi que les effets destructeurs de certains blocages corporatistes.

S’il ne s’agit pas de promouvoir une société sans aucun contrôle et au sein de laquelle l’individu est livré à lui-même, un système qui refuse de prendre en considération, à sa juste mesure, l’attente de nos concitoyens d’une part, et la volonté farouche de réussir de certains entrepreneurs d’autre part, ne peut que multiplier les blocages et limiter ses perspectives de réussite.

Présidentielle 2017 : faire entendre la voix des entrepreneurs

2017 est l’année de l’élection présidentielle puis des élections législatives qui se dérouleront dans la foulée. En quelques semaines, les décideurs politiques français auront été renouvelés, ou certains d’entre eux confirmés. Après les élections départementales de 2014, puis régionales de 2015, la France politique aura une nouvelle physionomie. Le prochain numéro des Cahiers Experts de Sountsou, à paraître le 8 octobre, vous donne des clés afin de faire entendre votre voix à l’occasion de ces élections. 

La préparation des programmes électoraux par les différentes équipes de campagne est un moment idéal pour que les entreprises apportent leur contribution et partagent leurs attentes.

Les nouveaux rythmes politiques ont fait quasiment disparaître « l’état de grâce », cet instant particulier, après l’élection, où les élus bénéficient d’un capital confiance important de la part de nos concitoyens. Désormais, les revendications réapparaissent rapidement et les nouveaux élus ne bénéficient plus de temps pour s’adapter à leurs nouveaux habits et aux ors de la république : il leur est demandé d’agir vite et bien, en respect, si possible, des engagements pris pendant la campagne électorale. Si les Français apparaissent souvent réfractaires à toute réforme, dès lors qu’elle est susceptible de les toucher directement, ils semblent également plus pragmatiques et prêts à accepter des remises en question.

Nos 10 conseils, très opérationnels et pratiques, vous aideront à participer au débat national qui se prépare et à faire entendre la voix des entrepreneurs et du monde de l’économie.

Les chefs d’entreprise restent méfiants à l’égard du politique qu’ils jugent avec sévérité. Néanmoins, le silence et la passivité ne sont pas des solutions. Au contraire, il est nécessaire que de plus en plus de dirigeants prennent la parole et fassent des propositions, issues du monde de l’entreprise, pour que les réformes permettent à celle-ci de trouver la place qu’elle mérite dans le pays.

L’approche que nous vous proposons pourra être utilisée, au-delà des élections à venir, pour vos initiatives en relations institutionnelles. Elle vous donne des bases solides à partir desquelles vous serez en mesure d’initier un véritable travail en gestion de votre influence.

Nos 10 pistes d’actions développées dans ce nouveau numéro de notre collection Les Cahiers Experts sont simples à mettre en œuvre, elles peuvent permettre d’engager quelques réformes clés pour le monde de l’économie ou votre entreprise.

Alors, réservez dès à présent votre exemplaire ici. Nous vous l’offrons.

Les entrepreneurs se mettraient-ils au lobbying ?

Ces dernières semaines les initiatives des entrepreneurs en direction des politiques se sont multipliées et c’est une bonne chose. Est-ce la perspective des élections régionales, de la présidentielle, un « ras-le-bol » face à l’incompréhension dont ils s’estiment victimes, en tout cas un sursaut entrepreneurial semblent à l’oeuvre.

MEDEF, CGPME et CCI ont mis en place des propositions en direction des candidats aux élections régionales en Île de France, décidées à porter la voix des entreprises et de faire en sorte que celles-ci soient mieux intégrées dans les politiques publiques. L’initiative de la CGPME et sa task force pour des propositions « business friendly » dans le cadre de la prochaine présidentielle vont dans le même sens. Les idées des membres de l’excellence RH afin que les salariés puissent plus facilement accéder à des mandats électifs permettront sans doute, si elles prospèrent, d’adopter dans quelques années des lois plus proches des réalités de l’entreprise.

Il s’agit bien d’actions de lobbying comme les accueils de parlementaires dans les entreprises pour des stages de quelques jours au côté des dirigeants. Une approche concrète du monde de l’entreprise qui peut faire évoluer bien des idées reçues et surtout connecter des élus avec un monde qui leur est encore trop souvent inconnu.

Réciproquement, il est également intéressant pour des entrepreneurs de s’immerger, au moins quelques heures dans le monde parlementaire afin de comprendre le quotidien de nos élus, souvent très éloigné des clichés populistes qui pullulent. C’est notamment le choix du dirigeant de Poclain Hydraulics, Laurent Bataille qui a suivi le Député (LR) Hervé Mariton après que celui-ci ait été accueilli en stage dans son entreprise.

Le 8 octobre, notre collection Les Cahiers Experts s’enrichira d’un nouveau numéro exceptionnel intitulé « Présidentielle 2017 : 10 conseils pour faire entendre la voix des entrepreneurs ». Notre ambition est d’accompagner ce mouvement entrepreneurial en direction du monde politique. L’actualité récente le montre encore cruellement (voir notre article sur le lobbying du disque), les entreprises sont souvent malmenées par des décisions brutales, parfois prises avec un manque total de concertation. Néanmoins, la politique de la chaise vide est loin d’être une solution.

Au sein de Sountsou, nous militons pour que les chefs d’entreprise s’impliquent plus en direction des politiques. La présidentielle de 2017 est un formidable rendez-vous : elle constitue l’élection majeure de notre démocratie et elle marque le point de départ d’un vaste renouvellement des élus aux responsabilités, quelque soit le gagnant.

C’est donc le moment de se lancer et de réfléchir à la construction de votre démarche institutionnelle que vous soyez déjà organisé ou non. Notre Cahier Expert, très concrètement, vous donne quelques clés. N’hésitez pas à nous le demander ici. Nous vous l’offrons.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

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Le Refuge a besoin du soutien des entreprises

Nicolas Noguier, président de l’association Le Refuge, répond à nos questions sur l’action de son association et sur le Fonds de Dotation contre l’homophobie et la transphobie (FDCHT) qu’il vient de créer afin d’associer les entreprises à son action.

Newsroom Sountsou : Quelle est concrètement l’action du Refuge ?

Nicolas Noguier : L’association est gestionnaire, sur tout le territoire, de 15 dispositifs d’écoute, d’hébergement temporaire et d’accompagnement psychologique et social à destination d’adolescents et jeunes majeurs confrontés à des situation d’homophobie ou de transphobie de la part de leur entourage, notamment de la cellule familiale. En 2014, l’association a  accompagné 1 039 jeunes dont 237 qui ont bénéficié d’un hébergement. L’association dispose d’une ligne d’écoute nationale accessible 24h/24. Plus de 5 000 jeunes ont composé le numéro du Refuge en 2014 et 50 000 textos ont été échangés. Le Refuge sensibilise également le personnel social, éducatif et médical au contact des jeunes. Les interventions en milieu scolaire se sont multipliées depuis l’obtention de l’agrément national délivré par le Ministère de l’Éducation Nationale. Enfin, plusieurs bénévoles accompagnent des jeunes détenus et luttent contre leur isolement par le biais d’échanges épistolaires. Plus de 500 bénévoles ainsi que 14 salariés mais également des jeunes volontaires du service civique accompagnent les jeunes de plus en plus nombreux qui nous contactent.

Newsroom Sountsou : Les jeunes victimes d’homophobie et de transphobie sont-ils moins nombreux aujourd’hui après, notamment, les débats autour du Mariage pour Tous ?

Nicolas Noguier : L’association a connu un pic d’activité dès la fin de l’année 2012. Depuis les appels ne cessent d’augmenter. En cette rentrée 2015 nous avons une croissance de 20% des appels et des prises en charge consécutives, par rapport à la rentrée 2014. L’homophobie s’est ancrée dans notre société et les actions de prévention comme celles portées par Le Refuge sont plus que jamais nécessaires.

Newsroom Sountsou : Quelles sont les ressources dont disposent Le Refuge pour assurer cet accueil et cet accompagnement ?

Nicolas Noguier : Les ressources proviennent essentiellement de la générosité de nos adhérents et donateurs puisque 70% de recettes proviennent du secteur privé, dont 15% au titre du mécénat d’entreprise. C’est la raison pour laquelle Le Refuge fait régulièrement appel à la générosité publique. Les fonds récoltés permettent de pérenniser les dispositifs existants et d’offrir de nouvelles opportunités aux jeunes présents sur liste d’attente. Le soutien du secteur public ne représente que 30% alors que notre association a, par définition, des missions d’utilité publique et que la lutte contre l’isolement et le mal-être des jeunes est une thématique de santé publique.

Newsroom Sountsou : Vous avez lancé, récemment, le Fonds de dotation contre l’homophobie et la transphobie (FDCHT), quel est l’objectif de ce Fonds ? 

Nicolas Noguier : Il s’agit du premier fonds de dotation destiné au financement d’actions en faveur de la lutte contre l’homophobie et la transphobie. L’objectif est de favoriser le mécénat des entreprises. 100% des sommes récoltées iront au soutien d’associations portant des projets novateurs dans le domaine de la lutte contre l’homophobie et la transphobie. Les entreprises mécènes participent au processus de sélection des dossiers. De nombreuses entreprises se sont associées au lancement comme vous pouvez le constater sur le clip officiel. Avec la baisse continue du soutien des pouvoir publics, nous avons, plus que jamais, besoin du soutien des entreprises !

Newsroom Sountsou : Comment les entreprises peuvent-elles vous aider ?

Les entreprises peuvent nous apporter un soutien financier et améliorer leur image. En effet, ouvrent droit à une réduction d’impôt égale à 60 % de leur montant les versements (pris dans la limite de 0,5 % du chiffre d’affaires) effectués par les entreprises assujetties à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés au profit des fonds de dotation. Ainsi, une entreprise qui donne 10 000€ pourra déduire 6 000€ de ses impôts et afficher clairement ses engagements dans la lutte contre les discriminations et particulièrement l’homophobie.

Découvrez le film du Fonds de Dotation contre l’ homophobie et la transphobie avec les interviews de Agathe Albertini, directeur de la communication de JC Decaux, Lamine Gharbi, président du groupe Cap Santé et de la fédération de l’hospitalisation privée, Abdel Aïssou, directeur général de Randstad France, Frédéric Fougerat, directeur de la communication du groupe Altran… Film réalisé par Pascal Petit (www.zipcom.fr) :

Pour contacter le FDCHT :

contact.fdcht@gmail.com

Lobbying : victoire de l’industrie musicale

Il faut toujours se méfier des projets de loi et des promesses ministérielles. Les premiers peuvent servir de véhicules à des réformes difficiles et les secondes n’engager que ceux qui les entendent… Les radios françaises en font l’amère expérience.

En juillet, Fleur Pellerin présentait en Conseil des ministres son projet de loi « création, patrimoine, architecture » qui ne devait en rien concerner l’audiovisuel ou les radios. Une promesse qui se traduisait par l’absence de mesures contenues dans ce texte visant à une réforme du secteur audiovisuel. Du reste, la commission des affaires culturelles de l’Assemblée Nationale, pour préparer le passage en première lecture le 28 septembre, n’avait pas auditionné les acteurs du secteur puisqu’ils n’étaient ciblés par aucune mesure particulière.

Les dirigeants des radios françaises étaient donc assez confiants, même si le rapport Bordes sur « l’exposition de la musique dans les médias », publié en mars 2014, sur commande ministérielle et sous la plume de l’industrie du disque, les avaient passablement agacés.

Ils n’ont donc pas vu venir le coup, préparé en catimini, qui explosera en réunion de la commission des affaires culturelles à la mi-septembre. Il prend la forme d’un amendement co-signé par une quarantaine de députés. Par cet amendement, les parlementaires proposent de modifier les quotas de chansons francophones à la radio en instaurant un plafonnement des rotations de nouveautés françaises. Ainsi, dans le cas d’un Top 10 concentré sur plus de 50% des diffusions francophones, les titres concernés seraient purement et simplement sortis du calcul des quotas.

Patrick Bloche, président de la commission et fin connaisseur du paysage audiovisuel a beau tenter de ramener ses pairs à la raison en arguant notamment qu’il lui semble inenvisageable de procéder à une telle réforme sans entendre les principales concernées, les radios, rien n’y fait, les députés de la majorité votent en commission le-dit amendement.

Les badineries de Fleur Pellerin, qui feint en séance de s’en remettre à la « sagesse » des députés, pour « twitter » quelques minutes plus tard sa satisfaction de voir la mesure adoptée restera dans les annales des petites manipulations ministérielles…

Dans cette affaire, les radios ont été bernées et les députés manipulés. En sous mains, depuis des mois, l’industrie du disque manoeuvre pour que cet amendement soit adopté afin de lui permettre de profiter à plein de l’exposition de ses artistes sur les radios. La complicité de la rue de Valois permettra in fine au lobbying redoutablement efficace des industriels du disque de remporter une victoire remarquable mais désolante pour la liberté.

Rien de grave à priori, c’est finalement le rôle du lobbying de permettre aux positions de se confronter, les parlementaires quant à eux, ont pour mission de voter la loi et d’assumer leurs choix. Librement. Or, précisément, c’est là que le système dérape dangereusement. Les radios françaises n’ont pu partager avec les parlementaires leurs positions et leurs analyses, elles n’ont pas été auditionnées dans le cadre de la préparation de ce projet de loi, pas plus que le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), l’autorité indépendante en charge de veiller au respect de la loi.

Ainsi, la loi de 1986 modifiée sur la liberté de la communication est-elle amendée sans concertation, sans entendre les principaux acteurs et en méconnaissance totale des enjeux auxquels sont confrontées les radios françaises. Il s’agit d’une rupture inédite dans la régulation du paysage audiovisuel français.

Cet amendement, sous couvert de diversité culturelle et de soutien à la création francophone, permet aux industriels du disque d’avoir un droit de regard sur la programmation musicale des radios. Il ne tient aucunement compte de la réalité de la production de nouveautés francophones par les industriels du disque qui s’est effondrée de 62,3% en un an ! Il ne prend pas plus en considération le déséquilibre concurrentiel dont sont victimes les radios face aux acteurs du net qui évoluent dans un paysage totalement dérégulé, une situation parfaitement comprise des industriels du disque qui sont actionnaires des plate formes de streaming…

Les débats publics, en séance du 30 septembre, ont démontré le peu de préparation des députés sur ce sujet et à quel point le gouvernement est nourri par les arguments des industriels de la musique. Seul le député Patrice Martin-Lalande (LR) a pointé les risques du nouvel article 11 ter et signalé au passage qu’il pouvait être assimilé à un cavalier parlementaire, un outil peu apprécié du Conseil constitutionnel.

On comprend mieux le choix du gouvernement de ne pas avoir inscrit cette mesure dans le projet de loi initial, il feint ainsi de ne pas la maîtriser vraiment et limite le risque de s’exposer aux foudres du Conseil constitutionnel. Néanmoins, les faits sont têtus, il est évident que le cabinet de Fleur Pellerin est à la manoeuvre, en soutien des acteurs du disque, depuis le début. Le chemin choisi ne vise qu’à s’exonérer de longs débats houleux et difficiles au bénéfice d’une « opération flash ». Si la mesure visant à réformer les quotas est si bénéfique et efficace qu’elle le prétend, Fleur Pellerin aurait sans doute gagné en crédibilité en prenant le temps d’écouter les radios, dont elle a également la tutelle en qualité de … ministre de la communication.

Les sénateurs, avec leur sagesse légendaire, pourraient revoir sérieusement une copie qui n’est clairement pas au niveau des enjeux.