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Lobbies : ces activistes au cœur du pouvoir

Longtemps décrié, le lobbying est devenu l’outil préféré des activistes et des ONG. Ces dernières ont bureaux ouverts au cœur des centres de décision de la République et elles ne manquent aucune occasion d’en faire usage.

Les principaux sujets auxquels les Français sont légitimement sensibles font l’objet d’un intense lobbying auprès des décideurs politiques. Contrairement à bien des idées reçues, ce ne sont plus les entreprises qui sont en position de force pour faire avancer leurs problématiques. Les ONG et les activistes ont considérablement gagné en influence. Plusieurs facteurs ont permis à cette nouvelle réalité d’émerger.

Les réseaux sociaux permettent d’asseoir un nouveau pouvoir : celui de la nuisance. Les politiques sont fortement exposés à des polémiques. Un simple rendez-vous dans un restaurant avec un responsable d’entreprise représente un risque réel de se retrouver dans un tweet avec une photo et un commentaire, potentiellement dévastateurs. Les ONG et les activistes maîtrisent parfaitement les réseaux et n’hésitent pas à les utiliser massivement pour leurs campagnes de sensibilisation. Ils multiplient les caméras cachées et les invasions au sein d’entreprises ou d’exploitations agricoles, par exemple. 

Réseaux sociaux et médias constituent de puissants relais pour ces acteurs. Leurs positions sont considérées comme relevant de « l’intérêt général » et elles sont donc largement suivies. Il n’est pas rare que de grands quotidiens consacrent leur une à leurs sujets, suivis par les chaînes de télévision. C’est ainsi qu’une pression médiatique continue s’exerce sur les décideurs politiques.

Certains responsables d’ONG ou d’associations militantes sont devenus des élus. Ils assurent, en direct, la représentation des intérêts de leur association au sein même du Parlement. Ils utilisent tous les moyens pour faire avancer leurs sujets. Ils créent des structures informelles présentées comme transpartisanes. Les députés y adhèrent d’autant plus facilement qu’ils sont nombreux à se sentir esseulés et à la recherche d’une visibilité qu’elle soit nationale ou locale.

Ce lobbying ne se limite pas au Parlement, il s’infiltre également dans de multiples organes de décision publique ou parapublique. Il suffit de regarder en détail les comptes Twitter de collaborateurs de certains EPIC (établissement public à caractère industriel et commercial) pour comprendre à quel point le monde économique est ciblé. Encore plus proche des lieux de décision, certains collaborateurs de cabinet sont issus du monde associatif.

C’est ainsi que l’on ne compte plus les amendements issus directement des associations. Ils défendent une vision particulière de la société et font avancer des décisions, souvent sans étude d’impact, sans recul industriel, avec pour seule justification, leurs propres enjeux. Il est fréquent que des rapports parlementaires soient rédigés sous un angle pré déterminé afin d’aboutir à une proposition de loi orientée. Les entreprises sont, parfois, auditionnées mais leurs représentants comprennent que les échanges n’aboutiront à rien. Leur présence est tolérée mais elles ne sont pas écoutées. Leurs arguments ne sont pas ceux attendus.

Le résultat peut être désastreux. Des projets de loi récents ont été véritablement caviardés sous la pression de certains députés et ressortent des discussions parlementaires criblés de nouvelles mesures coercitives lourdes de conséquences pour le monde économique, sans que leur efficacité ne soit démontrée. 

Il s’agit d’un retournement de situation profond et durable. Il est indispensable que les entreprises et leurs Fédérations professionnelles s’adaptent à cette nouvelle réalité du pouvoir. Or, il est complexe pour le monde économique d’intégrer ces nouveaux modes d’action. 

En outre, cette situation correspond à de nouvelles attentes qui doivent impérativement être prises en compte par les entreprises : forte sensibilité à la transition écologique, nouveaux modes de consommation, souci d’une alimentation plus saine etc. Parfois, il est nécessaire de faire pivoter le modèle économique afin de répondre à ces attentes qui correspondent à des enjeux sociétaux et collectifs. 

Certaines entreprises, à tort, tentent de résister, de gagner du temps voire de contourner ces tendances lourdes. Elles devraient plutôt s’en emparer pour se transformer et engager un dialogue clair avec la puissance publique afin de négocier sereinement le temps nécessaire à leur adaptation.

Les rendez-vous électoraux accélèrent les prises de décisions radicales pour « imprimer » auprès des électeurs. La perspective de la présidentielle de 2022, l’état fortement gazeux de l’opinion, devraient inciter le monde économique une prise en compte urgente de ces nouvelles réalités.