L’actu

Catégorie : Édito

La France debout

Nous vivons une drôle d’époque. Quelques personnes qui passent leurs nuits debout et dont on ne sait pas de quoi sont faites leurs journées font la une quand la France debout, celle qui se lève tôt et travaille disparait de notre champ de vision.  

Ils s’appellent les Nuit Debout, ils se réunissent dans quelques places symboliques de Paris et de province, « réfléchissent » dans un débat collectif sous forme « d’AG » populaires et, accessoirement, insultent des philosophes, brisent quelques vitres.

Ces Nuit Debout sont en fait disparates, ils sont composés de gens déçus de la gauche, d’utopistes, d’anarchistes, d’écolos qui souhaitent imaginer un nouveau monde. Ce mouvement organisé en « commissions » est intéressant, après tout on ne peut que se féliciter que la chose politique intéresse encore les Français. Le seul souci c’est que ces quelques centaines de personnes ne sont pas les Français. Ils sont une infime composante de notre société, un groupuscule remarqué parce qu’il occupe illégalement la Place de la République à Paris.

Face à ces Nuit Debout, il y a une France Debout, qui avance et continue imperturbable de travailler, de payer ses impôts et ses charges et de se débattre avec une administration de plus en plus tatillonne qui ne lui passe rien. On imagine quelle serait la réaction des autorités si cette France déjà Debout se levait vraiment pour occuper des places de nos villes… Il ne lui serait vraisemblablement rien pardonné.

Le problème avec ces Nuit Debout c’est qu’ils sont écoutés. La loi travail tient compte de certaines de leurs revendications. Ils restent Debout car cela ne leur suffit pas. Dans l’idéal, ils aimeraient aller beaucoup plus loin : les 32 heures, une plus grande taxation des « riches », plus de contrôles sur les entreprises, une nouvelle société anti capitaliste etc.

Alors la France Debout, celle des besogneux, continue de travailler. Elle observe et subit, atterrée, les grèves motivées par des préservations de rentes de situation inimaginable pour elle, les manifestants de tout poil toujours mécontents et prompts à critiquer sans vraiment s’impliquer, les éternelles victimes d’une méchante société, les anti-entreprise chroniques…

Dans un an, tous les Français seront amenés à voter. Ces contrastes saisissants devraient s’exprimer dans les urnes qui pourraient bien se transformer en porte-voix d’une exaspération trop longtemps contenue. Alors, il sera trop tard pour agir.

Mathieu Quétel, président de Sountsou – Affaires Publiques

Ras-le-bol du lobbying anti-entreprise !

 

Cette tribune a été publiée dans Le Cercle Les Échos.

Les entreprises sont victimes d’un lobbying anti-entrepreneurial rampant, sournois et dévastateur dont l’ensemble de notre économie paie les effets.  

L’accueil de Pierre Gattaz, président du Medef, lors de l’émission On n’est pas couché sur France 2, par une horde de manifestants issus du mouvement Nuit Debout, n’est que le reflet de l’ambiance anti-entreprise qui règne dans ce pays.

Les manifestants portaient samedi soir des masques représentant des hommes politiques, dont certains sont mêlés à des affaires. Même si ces derniers bénéficient bien entendu de la présomption d’innocence, on voit bien que l’objectif des agitateurs de plateau était de créer un raccourcit entre Pierre Gattaz, présenté comme le représentant des entreprises, et ces responsables afin de les confondre dans le même « Tous pourris » à la mode.

Un lobbying anti-entreprise systématique

Les manifestations autour de la loi travail ont été lancées autour des assouplissements pro-entreprises que le texte était censé poser. Ainsi, les animateurs du mouvement ont cristallisé leur action contre l’entreprise, d’abord avec la pétition de Caroline de Haas, puis avec les manifestations initiées par l’UNEF, enfin par les Nuits Debout. L’entreprise est devenue le bouc émissaire de revendications multiples dont, au final, très peu la concernent directement.

Qu’il y ait des raisons d’être inquiets face à la situation économique voir aux incertitudes de l’avenir, certainement. Mais est-ce le monde de l’entreprise qui creuse le déficit de la France ? Est-ce le monde de l’entreprise qui est responsable de notre incapacité à accrocher la croissance ? Les entrepreneurs sont-ils responsables du record européen de fiscalité qui pèse sur les Français ? Les chefs d’entreprise sont-ils à l’initiative des lourdeurs administratives, réglementaires, fiscales qui rongent notre économie ?

Ce mouvement est une sorte de catharsis autour d’une anxiété collective qui trouve ses sources dans le rejet d’un quinquennat décevant ainsi que dans les craintes suscitées par un avenir incertain qui verra sans doute s’imposer de nouvelles formes de travail. Néanmoins, pendant que quelques milliers de personnes manifestent, que des agitateurs envahissent un plateau et que quelques autres occupent les tribunes médiatiques, des millions de Français travaillent, créent de la richesse, réalisent leur passion. Nuit Debout n’est pas la France. Nous sommes victimes d’un lobbying anti-entreprise systématique et porté par des politiques irresponsables, dont certains sont au pouvoir.

C’est Gavroche dans la rue, les Ténardiers au Medef !

C’est la représentation de l’entreprise et de l’entrepreneur qui est sans cesse caricaturée et déformée. Par nos politiques d’abord, sur le projet de loi travail ce sont bien les entreprises qui sont l’élément clivant du texte. Dans toutes les manifestations, ce sont les « patrons » qui sont montrés du doigt, désignés comme des exploiteurs dont le seul objectif serait de licencier. Le terme « patron » est presque devenu une insulte dans ce pays. L’un des slogan phare des manifestations est « Nous ne sommes pas de la chair à patron ». Voir des jeunes qui n’ont jamais mis les pieds dans une entreprise, être si virulents à l’égard de l’entrepreneuriat, c’est à la fois triste et mortifère. Comme si nous étions aux balbutiements de la Révolution industrielle. C’est Gavroche dans la rue, les Ténardiers au Medef ! Incroyable.

Les principaux responsables de cette situation délétère sont les politiques qui utilisent systématiquement les entreprises comme bouc émissaires de leur incapacité à réformer et de leur manque de courage. L’émission Dialogues Citoyens, sur France 2, jeudi dernier, a été l’occasion pour le Président de la République de tenter de renouer avec son électorat, une fois de plus sur le dos des « patrons ». Son échange avec la fondatrice de Envie de fraise, Anne-Laure Constanza a montré la capacité des politiques, y compris au sommet de l’Etat, à utiliser l’entreprise comme faire-valoir. À ce titre les extraits des déclarations de Messieurs Macron, Valls et Hollande qui déclaraient leur « amour » pour l’entreprise étaient bien cruelles.

À une question très concrète de la cheffe d’entreprise sur le temps partiel et la taxation des CDD, il a répondu sans craindre la caricature « vous voyez bien que, dans une société, on ne peut pas  embaucher des personnes, et chacun le comprendra, pour quelques heures », sur les stagiaires « on le sait bien, il y avait des abus, des entreprises embauchaient des stagiaires pour ne pas embaucher, même à temps partiel, des CDD ou des CDI ». Le chef de l’Etat a ainsi judicieusement martelé, tout au long de l’émission que la loi El Khomri visait à aider les salariés. Sans convaincre ni les salariés, ni les entrepreneurs.

C’est tout le paradoxe de la situation, à force de caricaturer le monde de l’entreprise, les politiques ne parviennent plus à réformer, leurs électeurs les renvoient à leurs propres contradictions. Ils paient le prix de leurs promesses. Leurs multiples déclarations à l’emporte pièce pour remporter l’élection explosent face à la réalité et leur reviennent en boomerang.

Il est indispensable que ce lobbying anti-entreprise soit combattu par les politiques eux-mêmes. La campagne présidentielle pourrait être l’occasion d’envisager le monde de l’entreprise dans une approche plus apaisée et de proposer des réformes qui soient réellement mises en œuvre. Il est indispensable que les entrepreneurs prennent toute leur part au débat. Eux aussi devraient se mobiliser.

Mathieu Quétel, président de Sountsou – Affaires Publiques

 

Quand le « tous nuls » rejoint le « tous pourris »

C’est la fête aux politiques ! Pas un édito, pas un commentaire, pas une émission où les élus ne soient mis en cause, accusés de tous les maux, éloignés du peuple, incapables de comprendre le quotidien de leurs concitoyens, déconnectés des réalités, la « vraie vie » ne les concerneraient plus… Il étaient « pourris », ils sont en plus « tous nuls », et nous ?

Dans mes différentes activités et responsabilités d’entrepreneur, d’élu, de responsable de syndicat patronal, j’ai eu à affronter ces phrases : « tous pourris », « les politicards »… Certains de mes interlocuteurs n’hésitaient pas à me qualifier de « politicien » au prétexte que je tentais de défendre ceux qui prennent en mains la gestion de notre vie collective, ou simplement parce que, brièvement, j’avais été élu. C’est dire si ces « brèves de comptoir » me sont familières.

Les Français sont ulcérés. Tous ne partagent pas les mêmes motivations mais nombreux sont ceux à en vouloir à leurs dirigeants, à leur reprocher la situation économique désastreuse et le chômage qui ne cesse de gangréner notre société.

Les entrepreneurs sont également en colère. Ils ont raison. Les promesses de réformes ne sont pas tenues, les entreprises sont utilisées comme bouc-émissaires faciles et le ratage monumental de la loi travail ne fait que confirmer cette situation désespérante.

Les initiatives « citoyennes » pullulent. Un ministre en poste lance un mouvement « citoyen et transpolitique », comme s’il n’était pas lui-même déjà au pouvoir, des micromouvements espèrent une primaire citoyenne (voir nos Brèves de primaire(s)), leurs premières déclarations publiques sont d’un populisme qui manque de nouveauté, quelques Français font des nuits blanches « debout » à réfléchir, partager pour changer le monde, mais semblent endormis le jour venu…

Bref, ça râle de partout, nous revendiquons, espérons, sommes devenus les rois du « il faut que », « on devrait », mais dès qu’il faut passer à l’action concrète, il n’y a plus grand monde et les initiatives constructives sont peu nombreuses.

Ceux qui proposent des pistes de réflexion, des réformes parfois radicales, à l’instar de Robin Rivaton, Gaspard Koenig, Jacques Attali ou Hervé Novelli s’exposent aux critiques. Néanmoins, ils sont dans l’action. Ils sont dans le vrai. L’incantation ne sert à rien sinon à se soulager un peu de cette colère qui rode. Les Français ont certes besoin de se faire du bien, de trouver des responsables aux conséquences de leurs inconséquences, alors cibler les politiques, les enfourner tous dans le même sac est facile et pratique, un peu comme aller chez Ikéa.

Nous sommes dans une année pré-électorale. C’est maintenant que les réformes se préparent, au lieu de feindre la révolte, de se réfugier dans la colère, les entrepreneurs, en particulier, devraient se mobiliser, travailler à des propositions et s’organiser pour qu’au lendemain des élections, les promesses se transforment en réformes concrètes.

Les politiques ne sont ni « tous pourris », ni « tous nuls ». Ils sont humains, ils doivent faire face à des électeurs de plus en plus consommateurs, de moins en moins acteurs. Les Français sont prêts pour les réformes à condition que celles-ci ne remettent surtout pas en question leur confort individuel. Cette condition est compréhensible mais destructrice.

Alors nous devons aider les politiques à avoir du courage, les accompagner dans la mise en oeuvre des réformes. C’est une responsabilité concrète qui pèse sur les entrepreneurs pour 2017. À eux de la saisir et de s’engager.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Loi travail : le coup de martinet aux entrepreneurs

La Loi travail au départ si prometteuse ne cesse de décevoir et les discussions parlementaires, loin de l’améliorer, risquent de révéler un peu plus en quoi l’entreprise est un marqueur entre droite et gauche dans notre pays. Ceux qui sont les grands perdants dans cette affaire, ce sont les entrepreneurs.

Après Caroline de Haas et sa pétition numérique si fédératrice, celui qui occupe désormais la lumière médiatique est William Martinet. Le patron de l’UNEF, syndicat étudiant proche du PS et pourtant farouchement opposé au projet de loi de Madame El Khomri a réussi le tour de force de mobiliser les lycéens et les étudiants qui ne sont pourtant pas concernés par le dispositif.

De manifestations de rue en #NuitDebout il ne cesse d’infliger au gouvernement de petites humiliations. Les ministres ont beau le recevoir dans leurs jolis bureaux des beaux quartiers parisiens, rien n’y fait, il en veut, ils en veulent toujours plus.

Ce jeune homme est déjà un professionnel du militantisme syndical. Les études ne sont pour lui qu’un « permis de militer ». À 27 ans, ses études ont « trainé » et il est donc encore président de l’UNEF, jadis pouponnière de parlementaires socialistes. Il a fait évoluer son syndicat avec son époque et il le fait coller avec les revendications et les inquiétudes, souvent légitimes, d’une partie de la jeunesse. La Loi El Khomri, maladroitement présentée puisque son texte préparatoire a « fuité » dans la presse, n’est presque qu’un prétexte, une sorte de véhicule protestataire d’une colère sourde de la jeunesse.

Ce projet de loi révèle le manque de préparation du gouvernement, son incapacité à gérer ses soutiens les plus proches ainsi que sa fragilité parlementaire qui se confirme au fil des mois. Il révèle également la faiblesse du lobbying patronal, sa déconnexion avec les outils d’aujourd’hui et son fonctionnement quelque peu désuet.

L’absence de mobilisation du monde de l’entreprise dans la défense de ce projet de loi qui, pourtant, allait dans le bon sens, doit être comprise comme une alerte pour 2017. Il serait vain d’imaginer que les réformes, demandées avec force par les entrepreneurs, pourraient s’engager sans soutien de terrain efficace, sans mobilisation de tous les instants pour braver les conservatismes et soutenir les dirigeants politiques mandatés pour les mener à bien.

Le monde de l’entreprise doit rapidement cesser de se lover dans les incantations et les revendications de salon pour s’organiser avec sérieux s’il veut que 2017 ne soit pas qu’un rendez-vous manqué de plus.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Quand Sarkozy a raison de faire des reproches aux entrepreneurs

Attention provocation ! J’ai déjà évoqué la semaine dernière le manque de réactivité du patronat lors de la présentation de la loi El Khomri 1 qui a été pulvérisée par une pétition sur le net et par manque de soutien. C’est précisément ce que l’ancien Président de la République vient de reprocher aux entrepreneurs.

Mercredi 23 mars, Nicolas Sarkozy avait rendez-vous avec des chefs d’entreprise à la Fondation Concorde afin de présenter son projet économique. Le think tank libéral avait déjà reçu François Fillon et Alain Juppé.

L’ancien Président de la République a tancé les chefs d’entreprise présents en leur reprochant leur absence du débat public et leur manque d’investissement au sein de leurs syndicats professionnels. Il est dans son rôle lorsqu’il défend son bilan et en renvoyant la responsabilité de son incapacité à mener la réforme d’autres que lui. Néanmoins, il faut bien avouer qu’il a raison sur un point : le monde économique est trop absent du débat public, il se cantonne trop à l’incantation et s’implique trop peu dans l’action.

On ne peut tout demander aux homme politiques. Ils sont responsables de beaucoup de choses, notamment de la situation économique de notre pays, littéralement tétanisé par des années de blocage. Néanmoins, ceux qui envisagent de réformer doivent être soutenus car le camps des conservateurs se bat pour préserver à n’importe quel prix ses privilèges. Le torpillage de la Loi El-Khomri nous le rappelle quotidiennement, comme les difficultés de mise en oeuvre de la (pourtant limitée) Loi Macron.

Oui, il est urgent pour le monde de l’entreprise de se prendre en main, de se mobiliser, de s’investir dans le débat public et d’innover. Rencontrer des politiques, écrire des tribunes, publier des livres, investir les r réseaux sociaux, imaginer de nouvelles façon de défendre les réformes indispensables au pays… les dirigeants ne peuvent plus déléguer ces actions devenues indispensables pour donner du courage aux politiques, leur imposer un rythme d’action et de mise en oeuvre de mesures plus proches des préoccupations du monde économique.

L’entreprise devrait être au coeur des débats pour la présidentielle de 2017, elle crée de la richesse, de l’emploi, donne du pouvoir d’achat elle est également l’un des lieu au sein duquel nos concitoyens peuvent se réaliser.

Sans une réelle implication des entrepreneurs, il sera impossible de réformer la France. Il est temps de se lancer !

Mathieu Quétel, président de Sountsou