L’actu

Jour : 15 janvier 2016

Les cadeaux, degré zéro du lobbying ? 

Le début d’année est toujours l’occasion des voeux. Si de plus en plus d’entreprises et de fédérations professionnelles renoncent aux cartes, jugées un brin surannées, d’autres les conservent et vont plus loin en perpétuant la tradition des cadeaux. Des initiatives qui peuvent se révéler malheureuses lorsqu’elles s’adressent aux élus.

Les élus changent, une nouvelle génération est apparue ces dernières années, très attachée à son indépendance et à une forme d’éthique jusque là assez inconnue dans les salons feutrés de la République. C’est ainsi, que chaque année au moment des voeux, fleurissent sur les réseaux sociaux des tweets et statuts courroucés ou ironiques sur les cadeaux reçus de la part de tel ou tel groupe d’intérêts.

Cette semaine j’en ai relevé un particulièrement savoureux accompagné d’une photo et qui posait la question « Dites @xxxxxxx, on ne vous a jamais dit que les cadeaux aux députés, c’était le degré 0 du lobbying ? ». Une interpellation publique qui a connu un certain succès au vu du nombre de retweets opérés par les 6000 followers de cette parlementaire.

L’affaire aurait pu en rester là si le syndicat professionnel ainsi mis en cause n’avait pas jugé utile de répondre via twitter avec, en plus, un manque évident d’humour. La députée s’est donc livrée à une leçon de lobbying en règle et a conclu l’échange par un dernier tweet cinglant « retour à l’envoyeur, désolée ». Ce n’est pas tant le lobbying en lui-même qui est ici en question que certaines pratiques qui relèvent d’un passé révolu ou en voie de l’être.

Dans le premier numéro de notre collection Les Cahiers Experts intitulé « Les 10 erreurs à éviter en relations institutionnelles », nous consacrions un chapitre à la question des cadeaux. C’est un sujet délicat car ces derniers doivent être utilisés avec parcimonie et finesse. Il convient de veiller à ne pas adresser un mauvais message. La France de 2016 n’est plus celle des années 80 et nos élus ont changé de posture. Ils acceptent bien volontiers de dialoguer avec les représentants d’intérêts, et certains reconnaissent même leur utilité dans l’accès à l’information et dans l’aide à la prise de décision mais nombreux sont ceux à être sourcilleux, à juste titre, de leur indépendance et de leur intégrité.

Je considère depuis longtemps que les cadeaux sont non seulement le « degré zéro du lobbying » mais également qu’ils appartiennent aux méthodes du « lobbying à la papa ». Je mets dans le même panier les déjeuners dans les restaurants coûteux et autres fantaisies qui ne relèvent pas d’un travail de conviction.

Cet incident assez drôle rappelle également que les élus ne se laissent plus faire et, au passage, que les réseaux sociaux peuvent se révéler redoutables.

Mathieu Quétel, président de Sountsou

Auteur de la Collection Les Cahiers Experts, le nouveau numéro « Présidentielle 2017 : 10 conseils pratiques pour faire entendre la voix des entrepreneurs » est disponible en téléchargement ici.

Sénat : les absents punis

Gérard Larcher a lancé dès son élection à la présidence du Sénat une réforme de la Haute Assemblée afin de la rendre plus lisible par les Français et de combattre son image de maison de retraite de bons serviteurs de la République. La sanction qui frappe 14 sénateurs est l’un des effets de cette réforme.

L’absentéisme est la maladie la plus répandue au Sénat, c’est pour cette raison que Gérard Larcher en avait fait l’une de ses cibles prioritaires lors de la présentation de sa réforme en mars dernier. Il vient donc de sanctionner 14 sénateurs pour « insuffisance de présence ».

Il n’y a pas de meilleure méthode que de frapper au porte monnaie, alors la sanction sera une ponction de 2100 euros sur leurs indemnités. Les 14 premiers sanctionnés peuvent s’estimer heureux, ils s’exposaient à une retenue de 4400 euros par mois soit 13200 euros pour un trimestre.

Le président du Sénat n’a pas poussé la transparence jusqu’à dévoiler les noms des sénateurs fautifs afin de ne pas les exposer à la pression médiatique. D’autant plus qu’il considère, chiffres à l’appui, que sa réforme est déjà positive puisqu’au cours du dernier trimestre 87% des sénateurs auraient participé aux votes solennels, 84% aux travaux de leurs commissions et 75% auraient assisté aux questions d’actualité au gouvernement.

Mais la réforme ne portait pas que sur la présence des sénateurs, elle visait également à mieux légiférer et à mieux contrôler. Avec un gain de deux jours sur l’examen du projet de loi de finances, le président Larcher est satisfait du résultat, tout comme il souligne que 60% des amendements votés par le Sénat ont été retenus par l’Assemblée Nationale.

Lobbying : L’humour de Uber

BFMTV révèle un aspect original des méthodes de lobbying de Uber en Angleterre. Visée par de nouvelles mesures de l’autorité de régulation londonienne des transports, la société américaine fait le choix de filmer ses clients en caméra cachée pour tourner en ridicule la nouvelle règlementation.

Le régulateur anglais souhaite imposer à Uber un délai d’attente de 5 minutes entre la prise de commande sur internet des clients et le début effectif de la course. Alors, Uber a décidé de soumettre les effets de la mesure « en direct » à ses clients sans les informer qu’ils étaient filmés. Cela donne des situations plus cocasses les unes que les autres qui tournent en dérision l’initiative anglaise.

L’agence Creature à l’initiative de cette campagne originale de lobbying intitulée « Que se passe-t-il  quand vous faites attendre Londres ? » soumet les clients du géant du VTC mondial à des attentes proposées par les chauffeurs sous différentes thématiques : jouer, écouter de la musique, faire des tours de quartiers, effectuer des gestes au ralenti etc.

Un petit moment de détente mais également une campagne virale réussie à voir dans la vidéo ci-dessous.

Les clients anglais de Uber filmés en caméra cachée

Présidentielle : c’est parti pour les primaires

Décidément 2017 est la ligne de mire des politiques en ce début d’année. Après la rentrée tonitruante et réussie d’Alain Juppé, voici le retour de Jean François Copé, l’installation de Bruno Le Maire, la digitalisation de François Fillon et les inquiétudes de François Hollande face à une partie de son camp qui ne trouve rien de mieux que de demander une primaire à gauche.

Il publie Le sursaut français chez Stock et initie son retour « en fanfare » comme le souligne Le Figaro par une mise en avant dans le numéro du 15 janvier de Valeurs Actuelles. Qu’on se le dise, Jean-François Copé est de retour et il entend bien peser dans les primaires de novembre, à tel point qu’il devrait, selon la rumeur, annoncer sa candidature en juin.

Autre candidat, encore non candidat officiel, Bruno Le Maire continue de parfaire son programme et son équipe. Il inaugurait son QG de campagne pour la primaire de la droite et du centre, le mercredi 13 janvier et envisage toujours d’officialiser sa candidature au début de l’été. D’ici là, les sondages devraient être meilleurs et la contre-offensive que prépare Nicolas Sarkozy pourrait avoir affaibli Alain Juppé.

François Fillon lançait en début de semaine la nouvelle version de son site internet qui lui permet de proposer les éléments de son programme pour 2017 et, surtout, de les tester auprès des français qui peuvent voter pour ses propositions ou envoyer directement leurs remarques et propositions.

Quant à François Hollande il feint de ne pas entendre ceux qui dans son camp demandent une primaire en vue de désigner le candidat « des gauches et des écologistes » pour la présidentielle de 2017. Le président de la République fait savoir qu’il ne peut combattre le terrorisme et le chômage et penser à 2017… Surtout l’initiative de personnalités de gauche qui signait le 11 janvier une pétition pour une primaire à gauche dans Libération ne rencontre pas un franc succès, au plus crée-t-elle un peu plus de confusion autour de la politique gouvernementale qui reste illisible pour une majorité de Français si l’on en croit les sondages.

La route vers 2017 est donc bien ouverte et il faudra désormais lire les prises de positions des uns et des autres avec cette perspective en ligne de mire. Les primaires de la droite et du centre ont été fixées aux 20 et 27 novembre 2016.

Lobbying : Misez sur les primaires

(Un extrait de notre dernier Cahier Experts)

Les deux grands partis de Gouvernement sont devenus adeptes des primaires.

Les Républicains, probablement avec leurs alliés du centre, vont les expérimenter pour la première fois les 20 et 27 novembre 2016.

Le PS, quant à lui, devrait y échapper, son candidat étant le président sortant.

Là encore, travaillez chaque écurie et identifiez des interlocuteurs proches de vos préoccupations dans chaque camp. Il s’agit de ne laisser passer aucune chance de vous faire entendre. Même si le PS ne devrait pas organiser de primaire, cette possibilité n’est pas encore tout à fait exclue (été 2015) ; identifiez donc celles et ceux qui seront à même de jouer un rôle si le parti décidait de ne pas forcément désigner le président sortant comme candidat naturel en 2017.

D’une manière générale, pour ce qui concerne les primaires, chaque candidat est important et doit faire l’objet d’une approche spécifique. Souvenez-vous du résultat de Manuel Valls de 5,63 % à la primaire socialiste de 2011 : peu nombreux étaient ceux à parier sur lui. Son parcours peut les amener à regretter, aujourd’hui, leur dédain de l’époque…

La politique est d’autant plus complexe et imprévisible que les enjeux se déroulent au plus haut niveau, ce qui est le cas de l’élection présidentielle. Il ne faut jamais l’oublier.

Ainsi, en 2016, tous les candidats déclarés à la primaire organisée par Les Républicains et le centre devront être identifiés, contactés, si possible rencontrés, et devront également disposer de vos arguments. Il suffit que l’un d’eux accepte de porter vos demandes pour que celles-ci puissent, le cas échéant, être intégrées dans un programme présidentiel. Ne sous-estimez aucun « petit » candidat : ils sont tous importants et seront tous (ou presque) amenés à jouer un rôle dans l’éventuelle future majorité. Une primaire sert également à peser et à compter ses troupes. Au-delà du résultat final, elle est l’occasion d’identifier des talents et de révéler des personnalités.

À gauche, il n’est pas acquis qu’une primaire ait lieu, même si certains la revendiquent. Préparez-vous comme si elle devait se dérouler et préparez-vous également à engager un travail sur tous les candidats éventuels de la gauche. Dans le contexte très particulier du Parti Socialiste, dont le président de la République est issu, les postulants auront mûri leur candidature et auront vraisemblablement un message assez différent du sortant à porter. Il conviendra de ne pas les négliger, car leur ambition sera de peser dans le prochain Gouvernement en négociant âprement leur ralliement.

Au PS, le point de rupture entre les courants se situe, bien souvent, autour du traitement social du chômage et de la gestion du monde économique. Celui-ci est encore considéré par certains comme hostile et, par nature, peu enclin à adopter des comportements vertueux à l’égard des salariés. Dans ce contexte, les « frondeurs », notamment, influeront vraisemblablement sur la mise en place du programme du prochain quinquennat.

Pour chaque camp, une cartographie précise des candidats aux primaires devra être réalisée : elle identifiera leurs prises de position, leurs soutiens et les éléments déjà connus de leurs programmes.

Mathieu Quétel, président de Sountsou et auteur des Cahiers Experts.

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